Une décision explosive de la Cour de cassation: votre patron peut désormais vous faire travailler jusqu'à 12 jours d'affilée (légalement)

Rédigé le 25/11/2025

La Cour de cassation a jugé qu'un salarié pouvait travailler plus de six jours d'affilé, et même jusqu'à 12 jours consécutifs. Mais attention aux conséquences en termes d'épuisement, d'absentéisme ou de sécurité.

C'est une décision qui pourrait bousculer les emplois du temps des nombreux salariés. La Cour de cassation a décidé qu'un salarié pouvait travailler plus de 6 jours d'affilée, et même jusqu'à 12 jours consécutifs, dans un arrêt rendu le 13 novembre.

La Cour a ainsi clarifié un point du droit du travail qui était sujet à différentes interprétations. Le Code du travail impose en effet un repos d'au moins un jour par semaine. Plus précisément, l'article L.3132-1 du Code du travail dispose: "Il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine".

Mais ce terme de "semaine" signifie-t-il sept jours de suite ou se réfère-t-il à une semaine civile, du lundi au dimanche? La Cour de cassation a tranché pour la deuxième option, après que le sujet a causé de nombreux litiges entre salariés et employeurs.

Un jour de repos entre le lundi et le dimanche

Elle s'est prononcée sur un cas qui opposait un directeur des ventes à son employeur, une entreprise de produits de beauté. Le salarié avait travaillé onze jours consécutifs, puis douze jours consécutifs quelques mois plus tard, à l'occasion de salons professionnels organisés le week-end. Il avait fait valoir son droit au repos hebdomadaire aux prud'hommes.

La Cour d’appel avait donné raison à ce salarié et avait condamné l’employeur à lui verser des dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos. Mais la Cour de cassation n'a pas eu la même lecture, elle a cassé la décision d’appel.

La Cour a décidé que ce repos s'entend par semaine civile. En clair, un salarié peut travailler jusqu'à douze jours d'affilée, par exemple du mardi au samedi de la semaine suivante, puisqu'il a bien eu un jour de repos dans chaque semaine civile (le lundi de la première semaine et le dimanche de la seconde).

Cette décision a le mérite de trancher un flou juridique et offre une plus grande souplesse aux employeurs et promet de bouleverser les conditions de travail de nombreux salariés.

"Je pousse l’équipe, je risque un accident du travail"

On peut s'attendre à ce que cette nouvelle règle soit particulièrement utilisée dans les secteurs qui fonctionnent de manière saisonnière, avec des pics de fréquentations à certains moment de l'année. On peut par exemple citer l’hôtellerie-restauration, le commerce, ou encore l’événementiel.

Mais cette nouvelle disposition ne vient pas sans risque, et c'est encore plus vrai pour les métiers physiques, avec des conditions de travail difficiles ou des normes de sécurité à respecter. Un problème pointé par Renaud de Kergolay, DRH d'une PME industrielle.

"Je pousse l’équipe, je risque un AT (accident du travail). Et si je ne la pousse pas, je perds la commande", explique-t-il, parlant de "dilemme industriel".

"On pense gagner en flexibilité. On crée surtout de la dette humaine: fatigue, erreurs, absences, perte de compétences, baisse de marge. La réalité business : on rattrape un retard, on ne rattrape jamais un régleur qui part", poursuit-il dans un post Linkedin. Sa conviction: "La performance industrielle commence là où la fatigue s’arrête."

Obligation de santé et sécurité

Même alerte du côté de Christel Pontié, formatrice en ressources humaines, qui estime qu'il n'y a "aucun gain réel à tirer sur la corde". "Car un salarié épuisé, même légalement, reste un risque psychosocial, un glissement insidieux vers le burn-out, les conflits ou l’absentéisme", pointe la spécialiste sur Linkedin.

Le site du service public précise néanmoins qu'une convention collective, dans un secteur spécifique, peut déroger à cette solution jurisprudentielle.

Il faut également rappeler que cette autorisation de travailler jusqu'à 12 jours consécutifs n'est pas sans limite, puisque l'employeur a l'obligation de garantir la sécurité et la santé de ses salariés (L.4121-1 du Code du travail).

Source BFM Business