Démission de Sébastien Lecornu : les banques françaises dévissent en Bourse

Rédigé le 07/10/2025

Société générale, BNP Paribas et Crédit agricole ont perdu entre 4 et 6% ce lundi, dans la foulée de l’annonce de la démission de Sébastien Lecornu. Leur activité pourrait être affectée par un ralentissement de l’économie.

Les banques françaises accusent le coup en Bourse de la démission surprise du premier ministre Sébastien Lecornu. Dès son annonce, Société généraleCrédit agricole et BNP Paribas ont immédiatement plongé, prenant la tête des plus fortes baisses du CAC 40. Dans l’après-midi, Société générale - qui dans la matinée dévissait de plus de 6% - perdait 3,25%, BNP Paribas 2,9% et Crédit agricole 2,8%, alors que l’indice phare de la Bourse de Paris cédait 1,2%.

« En Bourse, les banques réagissent toujours plus mal que les autres secteurs à l’incertitude politique, explique Julien Grandjean, directeur chez Fitch Ratings. Leur activité étant cyclique et directement liée à l’économie du pays, elles sont susceptibles de faire les frais d’un ralentissement de la croissance économique induit par la crise.» De fait, les investisseurs redoutent que la crise politique actuelle pèse sur l’activité et freine la demande de prêts des ménages et des entreprises. Une dégradation de la situation économique pourrait à plus long terme se traduire par une hausse des prêts non remboursés. « Ce que l’on ne voit pas pour l’instant, le taux des prêts douteux restant faible », souligne Kevin Thozet, membre du comité d’investissement de Carmignac.

Sensibilité à la dette française

Les cours des banques françaises sont également très sensibles au coût de la dette tricolore, en nette hausse : l’emprunt d’État Français (OAT) à dix ans est ainsi passé de 3,51% dimanche à 3,61% juste après la démission de Sébastien Lecornu. « Cette hausse renchérit un peu le coût de refinancement des banques, qui empruntent à long terme et prêtent à court terme, décrypte Kevin Thozet. Même si elles utilisent beaucoup les dépôts de leurs clients pour prêter, cela pourrait se traduire par une hausse des taux de crédit qu’elles accordent à leurs clients, et donc ralentir la demande.» Pour les analystes de Fitch Ratings, la hausse des coûts de refinancement pourrait un peu peser les marges de crédit des banques, mises à mal ces dernières années par la hausse des taux d’intérêt et qui étaient en train de se reconstituer. « Cela amoindrira un petit peu le rebond de ces marges », estime Julien Grandjean.

Les investisseurs sont également sensibles au fait que les établissements bancaires détiennent de la dette publique française, aujourd’hui sous pression. «Le lien entre les emprunts d’État et les banques était fort pendant la crise des dettes souveraines en 2011, mais aujourd’hui, il est marginal, explique Jérôme Legras, responsable de la recherche chez Axiom AI. Les règles comptables ont changé et les établissements ne sont plus pénalisés comme par le passé lorsque les taux de la dette publique se tendent. En outre, les banques détiennent bien moins d’emprunts d’État que par le passé.» La dette souveraine française représente environ 4% de l’actif total des banques tricolores, selon l’Autorité de contrôle et de résolution (ACPR), le gendarme des banques françaises.

Il reste qu’aux yeux des marchés, l’ensemble de ces éléments pourraient peser sur la rentabilité des banques françaises. « Elles sont solides. Cela fait plus d’un an que ces établissements sont confrontés à l’incertitude politique et cela ne les a pas empêchés de dégager de bons résultats et d’améliorer leur rentabilité », rétorque Julien Grandjean. Cette bonne santé est d’ailleurs visible dans leurs cours de Bourse, qui sont encore en forte hausse depuis le début de l’année : Société générale flambe ainsi de 100%, alors que BNP Paribas gagne 27,8% et Crédit agricole 23,4%. « Les investisseurs saisissent aujourd’hui l’occasion de la crise pour prendre leurs bénéfices », pointe Jérôme Legras.

Source le Figaro