Un salarié doit-il répondre à son chef en dehors de ses heures de travail et se met-il en tort s’il ne le fait pas ?

Rédigé le 07/01/2025

Un chauffeur routier sanctionné pour ne pas avoir répondu à son employeur en dehors de ses heures de travail a obtenu gain de cause devant la Cour de cassation. Les juges ont rappelé qu’un salarié n’a aucune obligation de répondre aux appels professionnels durant ses périodes de repos.

Dans une décision importante, la Cour de cassation a statué en faveur d’un chauffeur routier sanctionné pour ne pas avoir répondu à son employeur durant ses congés. Le salarié, en congé, avait ignoré les appels et messages de son employeur, qui lui reprochait son manque de disponibilité. Considérant cela comme une faute, l’entreprise avait pris des mesures disciplinaires à son encontre. Le chauffeur a contesté la sanction devant la justice et a finalement obtenu gain de cause, rapporte franceinfo le 5 janvier.

Tout commence par le licenciement pour faute grave d’un chauffeur poids lourds. L’employeur lui reprochait plusieurs comportements : avoir insulté son supérieur hiérarchique sur Facebook et pris des photos en conduisant sur une route enneigée. La justice a validé ces motifs de licenciement. Mais le chauffeur contestait également des sanctions disciplinaires infligées pour ne pas avoir répondu à son employeur en dehors de ses heures de travail. L’entreprise lui avait reproché d’avoir ignoré des appels téléphoniques destinés à lui communiquer son planning pour le lendemain, alors qu’il était en repos hebdomadaire.

Un licenciement contesté devant la justice

La cour d’appel de Nîmes avait donné raison à l’employeur. Elle avait estimé que, dans le secteur des transports, contacter les chauffeurs pendant leur jour de repos pour leur transmettre leur planning était une pratique courante. La cour avait également souligné que la convention collective applicable à l’entreprise n’interdisait pas cette pratique. Selon les juges, le chauffeur s’était toujours plié à cette règle jusqu’à ce que ses relations avec l’entreprise se détériorent. Mais la Cour de cassation a finalement annulé cette décision.

Dans son arrêt, la Cour a clairement rappelé un principe essentiel du droit du travail : un salarié n’a aucune obligation de répondre à son employeur en dehors de ses horaires de travail. Cela inclut aussi bien les périodes de repos quotidien que les jours de congé hebdomadaire. Selon la Cour, les appels téléphoniques passés par l’employeur pendant ces périodes ne peuvent justifier une sanction disciplinaire à l’encontre du salarié. Seule une situation d’astreinte peut obliger un salarié à rester joignable — et cela implique une contrepartie, comme une indemnisation ou un repos compensateur.

Des conséquences pour les employeurs

Cette décision a des répercussions importantes, notamment dans les secteurs où la transmission des plannings la veille pour le lendemain est une pratique répandue. Audrey Tomaszewski, avocate au cabinet Eversheds-Sutherland, estime que cet arrêt devrait inciter les entreprises à mieux anticiper l’organisation du travail. Pour Déborah Fallik, avocate chez Redlink Avocats, les employeurs pourraient encadrer cette pratique dans un accord interne, mais uniquement à condition d’offrir une contrepartie aux salariés concernés.

Source Capital